Jeudi 27 novembre s'est tenue la dernière commission permanente du conseil départemental de la Vienne pour l'année 2025.
Nous sommes intervenus à de nombreuses reprises pour mettre en cause les choix de la majorité.
Propos liminaires
Dès les propos liminaires, Ludovic Devergne a évoqué la mobilisation le jour-même des enseignants et parents d’élèves du collège Jules-Verne, à Buxerolles, pour l’intégration de l’établissement au dispositif Rep + (Réseau d’éducation prioritaire). Le conseiller départemental de Poitiers 2 a demandé au président de se joindre aux élus La Vienne en transition pour soutenir cette démarche. Le classement Rep + permettrait d’obtenir plus de moyens pour un collège dont les indicateurs socio-économiques sont parmi les plus pénalisants de l’académie.
« Monsieur le président, allez-vous soutenir les enseignants et les parents de Jules-Verne qui demandent le passage du collège en Rep + ? »
Ludovic Devergne
Manifestement pas préparé à cette question, Alain Pichon a dû s’y reprendre à trois fois pour formuler un avis, qui n’était pas un soutien : la demande de l’équipe éducative » est légitime « , mais il préfère demander la révision des critères de classement.

C’est ensuite Grégory Vouhé qui a pris la parole pour remarquer qu’une fois encore, il n’avait pas été invité à un événement organisé par le conseil départemental et se déroulant sur son canton : la visite de la ministre de la Culture Rachida Dati à l’église Notre-Dame-la-Grande. Une omission d’autant plus critiquable que le Grégory Vouhé est également membre de la commission Culture.

Enfin, Florence Harris a rappelé, deux jours après la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, l’état des lieux catastrophique dans la Vienne : en 2024, 1 032 victimes de violences conjugales ont été recensées entre janvier et octobre, en hausse de 13,5 % en zone gendarmerie et 5,7 % en zone police. 81 % sont des femmes. En 2025, deux féminicides ont frappé la Vienne : deux femmes qui avaient alerté, qui se savaient en danger, et qui n’ont pas été protégées à temps.
» Le 13 janvier, le Département a signé le protocole féminicide, qui organise la prise en charge des enfants après un homicide conjugal. C’est indispensable… mais c’est après l’irréparable.
En amont, les moyens ne suivent pas.
Les intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie sont utiles, mais ils interviennent sur toutes les violences, et ce ne sont pas des postes dédiés aux femmes victimes.
Le seul poste spécifiquement consacré aux violences conjugales — celui qui doit coordonner nos cinq réseaux — est financé à 97,6 % par l’État et l’Europe : 3 000 € du Département, sur un projet de 125 000 €.
Dans le même temps, le CIDFF, qui accompagne les victimes, voit ses subventions passer de 44 000 € en 2024 à 30 800 € en 2025. Le Planning familial passe de 500 € à 0 €.
Et la subvention demandée par l’ADSEA pour le centre de prise en charge des auteurs — pourtant indispensable pour prévenir les récidives — a été rejetée en 2024, puis rejetée en 2025.
Monsieur le Président, les violences augmentent, les féminicides se multiplient, mais les moyens départementaux diminuent. On ne protège pas les femmes avec des discours ; on les protège avec des actes et des budgets. Aujourd’hui, dans la Vienne, ce n’est pas le cas. «
Commission Climat et Développement durable : délibération n° 5
Une fois de plus, la question de la gestion de l’eau a été mise en avant à l’occasion de la délibération n° 5, portant sur une autorisation de prélèvement d’eau pour l’agriculture faisant l’objet d’une demande d’avis par le préfet de la Charente. Grégory Vouhé a répondu aux propos tenus dans la presse par Alain Pichon, qui défendait le principe des réserves de substitution pour sauver l’agriculture, y compris le maraîchage.
« Ce sont les plus gros qui sont en train de sacrifier les petits, pour devenir encore plus gros. »
Grégory Vouhé
» Avant de gaspiller l’essentiel de cette eau pour irriguer des céréales destinées à l’exportation […] il faut, d’évidence, sacraliser le volume sur le maraîchage et la polyculture élevage « , a fustigé l’élu de Poitiers 3.

Le groupe a voté contre cette autorisation de prélèvements.
Commission agriculture et ruralité : délibération n° 9
Florence Harris s’est saisie de la question des fonds dévolus au PCAE (Plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles) : seulement une partie du montant prévu au budget prévisionnel a été attribuée pendant l’exercice 2025.
» Sur les 90 000 € de crédits votés au BP 2025, seuls 63 % ont été consommés. Il resterait donc plus de 33 000 €. Comment ces crédits non-utilisés seront-ils réaffectés ? Sont-ils fléchés vers une autre action, et, si oui, laquelle ? » s’est inquiétée la conseillère départementale de Poitiers 3.
Avant de suggérer : » Serait-il possible d’envisager qu’ils soient dédiés aux associations et organisations professionnelles agricoles dont les subventions ont été diminuées ou rejetées ? Ce serait une manière cohérente de soutenir celles et ceux qui agissent concrètement pour nos territoires. «
Il lui a été répondu que les sommes restantes correspondaient à des projets non réalisés, et qu’il n’était pas possible de transférer ces crédits d’investissement vers la section fonctionnement. Ce sont 33 000 € qui retombent ainsi dans le budget général, plutôt qu’être utilisés en faveur du monde agricole.
Commission Santé : délibérations n° 22 et 23
Vigilante quant à l’optimisation de l’utilisation des fonds publics au service de tous, elle a ensuite demandé des explications sur la baisse de 60 % de l’enveloppe dévolue à la prévention spécialisée. » Nous devons nous prononcer aujourd’hui sur un financement de la prévention spécialisée, mais les informations dont nous disposons sont très partielles. Pour les habitant·es de la Vienne, nous avons besoin de transparence et d’éléments clairs avant de voter. «
L’élue référente s’étant montrée incapable de répondre, c’est le directeur à l’enfance qui a donné l’a réponse l’explication : fin 2024, les montants votés correspondaient à deux années d’exercice ; fin 2025, on est revenu à un budget annuel.
« Votre politique de santé coûte cher, et elle ne règle rien. »
Florence Harris
Puis, à l’occasion du vote d’une aide à des étudiants dans les métiers de la santé, Florence Harris est de nouveau intervenue. Un rapport de la cour des Comptes publié récemment met en doute l’efficacité des incitations financières à l’installation de professionnels de santé. Un diagnostic posé par l’élue du canton de Poitiers 3 depuis plusieurs années.

» Aujourd’hui, la cour des Comptes vient balayer vos certitudes. Dans un rapport d’une grande clarté, elle confirme […] que ces aides financières dispersées sont coûteuses, mal pilotées, mal ciblées et, pour une large part, inefficaces pour lutter contre les déserts médicaux. Ce n’est pas une position politique : c’est le constat d’une institution impartiale « , a t-elle scandé.
La Cour rappelle aussi que » ce qui attire vraiment les médecins, ce ne sont pas les aides individuelles, mais un exercice coordonné, en équipe, comme celui que permettent les centres de santé où les médecins exercent avec d’autres professionnels de santé sous statut salarié. Autrement dit : tout ce que vous refusez systématiquement. »
» Et au fond, tout est là : vous dépensez, mais vous ne construisez rien. Il est temps d’admettre que vous avez fait fausse route et de mettre enfin en place une politique de santé digne de ce nom, pour les habitantes et les habitants de la Vienne. «
Devant les dénégations des élus de droite, qui répondaient que les chiffres d’installations de professionnels de santé dans la Vienne étaient bons, Grégory Vouhé s’est insurgé : « Vous ne pouvez pas vous attribuer le mérite des ces installations ! C’est invraisemblable ! » Tandis que Florence Harris a rappelé : » Ce n’est pas avec moi que vous n’êtes pas d’accord : c’est avec la cour des Comptes ! »
C’est Ludovic Devergne qui a conclu l’intervention du groupe sur ce point : » Nous sommes attentifs à l’efficacité de la dépense publique. Le rapport de la cour des Comptes devrait vous interroger. «
Commission Éducation, Collèges, Universités, Bâtiments : délibérations n° 36 et 37
Revenant sur les inquiétudes de certains enseignants, membres du personnel et usagers du collège Jean-Moulin, Florence Harris a critiqué la faible réponse apportée par le Conseil départemental :
» Je veux revenir sur la lettre signée par le vice-président à l’éducation, adressée aux membres du conseil d’administration du collège Jean-Moulin : un courrier strictement technique, sans empathie, alors que leurs inquiétudes sont légitimes.
Iels avaient posé des questions précises sur la présence d’amiante dans certains locaux et sur d’autres problèmes d’hygiène et de sécurité. Les réponses ont été partielles, et leurs demandes concrètes — comme des ventilateurs pour les salles — n’ont pas été prises en compte. Je peux vous le dire : les personnes présentes au conseil d’administration étaient indignées.
« C’est un mandat qu’on empêche d’exercer. »
Florence Harris
Le respect commence par la clarté : quand tout devient opaque, on finit par se demander ce qu’on cherche à nous cacher.
Monsieur le Président, je vous ai écrit il y a plus d’un mois sur ces mêmes sujets, sans aucune réponse. Et quand des élu·es siègent au même conseil d’administration sans disposer des mêmes informations, ce n’est pas anodin : c’est un mandat qu’on empêche d’exercer. «
Le délibération n° 37 portait sur la prolongation d’un an (4 ans au lieu de 3) de la convention de subventionnement du campus de l’Esigelec. Un investissement massif du Département dans une école privée que La Vienne en transition a déjà mise en cause auparavant.
» Comment s’explique cette quatrième année de convention ? a demandé Ludovic Devergne. L’argent investi par le Département est-il efficacement employé ? » L’élu en charge du dossier a dû concéder que l’école se développait » moins vite que ce qu’on aurait pu attendre « , sans pouvoir produire d’informations précises. » Nous demanderons des éléments chiffrés et vous les donnerons dès que nous les aurons « , a-t’il botté en touche.
La Vienne en transition a voté contre cette prolongation de subventionnement.
Commission Culture et Evénementiel : délibérations 46 et 48
Grégory Vouhé n’a pas retenu ses coups à l’encontre des coupes effectuées par les élus de la majorité dans les sommes allouées à la culture et à l’animation du territoire.
En effet, 14 000 € n’ont pas été utilisés au titre du budget culture, alors que la majorité départementale a réduit de façon systématique les crédits alloués par rapport aux préconisations des services » dont on ne saurait mettre en doute l’expertise « .
Rappelant que la maison de quartier de Saint-Eloi, sur son canton, a vu sa subvention baissée de 15 % alors qu’elle est située en zone d’éducation prioritaire, Grégory Vouhé a insisté sur la responsabilité du groupe majoritaire : » On ne peut que constater que l’argent public était disponible pour les habitants, et que des personnes de notre département ont été privées de ces moyens par votre seule volonté. «

Les échanges ont été plus vifs encore sur le sujet habituellement plutôt consensuel du Fcal (Fonds cantonal d’action locale) : il s’agit pour chaque élu d’attribuer des subventions aux associations de son canton qui contribuent à l’animer, au moyen d’une enveloppe annuelle qui lui est attribuée.
Grégory Vouhé a fustigé le fait que deux conseillers généraux n’ont pas jugé utile d’attribuer l’intégralité de leur fonds : Chasseneuil (12 % non affectés) et Lusignan (un quart) ; » comme s’il n’y avait aucun besoin, rien à soutenir sur ces territoires « .
« Il n’y a que l’embarras du choix, pour les élus volontaires, qui souhaiteraient soutenir leur territoire. »
Grégory Vouhé
Citant plusieurs associations basées à Poitiers mais dont l’action bénéficie à tout le département, le conseiller de Poitiers 3 a suggéré qu’elles devraient solliciter ces deux conseillers, concluant : » Nous pourrons mesurer l’évolution de votre implication au service de la population. »

Cette dernière intervention a suscité une bronca dans la salle. L’un des élus visés a cherché à culpabiliser « ses » associations, qui le sollicitent » mais qui ne savent pas gérer un budget « . « On n’a pas la même philosophie que vous à perfusionner [sic] des associations qui ne savent pas gérer. On n’a pas comme vous les poches ouvertes. » Les associations locales apprécieront.

